Notre voyage en yacht à moteur dans la région des mirabelles
Nous élisons domicile à bord un Linssen Grand Sturdy, pour cinq semaines. Nous louons pour la 10e fois un bateau auprès de la Yachtcharter Holiday tours à Merzig/Sarre dont nous apprécions l’accueil amical et chaleureux. C’est donc à raison que l’on peut nous qualifier de récidivistes par conviction.
Tous les bateaux sont aussi bien équipés que des yachts privés. Vu de l’extérieur, seule la discrète mention « www.saarmoselyachtcharter.de » révèle qu’il s’agit d’un bateau de location.
Notre « Delfin » est un véritable miracle d’espace. Nous rangeons 36 bouteilles d’eau de 1,5 l et diverses bouteilles de vin à la « cave » qui pourrait facilement en contenir le double. Chaque centimètre est utile, chaque coin et chaque recoin utilisables.
Nous démarrons à la mi-journée par temps variable en direction de la vallée. Après la magnifique boucle de la Sarre, nous arrivons à Mettlach, la première des trois écluses assez élevées de la Sarre. Après le passage de la première écluse sur la Moselle à Grevenmacher (Luxembourg), nous faisons une escale à Nittel, où nous amarrons au ponton communal. Bien que nous ayons comme toujours réservé notre emplacement, il est occupé par un « bateau balançoire » (c’est ainsi que l’excellente journaliste nautique Doris Sutter surnomme les bateaux sans permis loués par de grosses sociétés comme on en trouve en France). Uniquement rattachée au cordage avant et arrière, cette « villa flottante » est fortement secouée à chaque passage d’un grand bateau. Pour plus de sécurité, nous ajoutons d’autres cordages et jetons l’ancre. Nous dégustons un délicieux repas dans la salle Champagne du domaine viticole Hellershof-Zilliken, et l’Elbling si typique de la région est particulièrement bon.
Yacht Charter Holiday Tours website
Merzig/Sarre – Charmes/Canal des Vosges
Si la Sarre inférieure connaît d’autres sas d’écluses pour bateaux de passagers et de plaisance plus petits, il faut sur la Moselle utiliser les grands sas (au moins 170 m x 11,40 m). Ce n’est qu’en France qu’il existe encore trois écluses à péniches (40 m x 5,60 m).
Le lendemain, nous poursuivons en direction de Thionville. Au bout de 4 écluses et 54 km, nous atteignons le bief amont de l’écluse.
Après seulement trois autres écluses et 30 km, nous arrivons à Metz vers midi. Cette escale est un must. Outre la cathédrale bien sûr et ses célèbres vitraux peints par Chagall, les îlots et bras secondaires de la Moselle caractérisent la vue qu’offre le chef-lieu de la Lorraine. Nous voilà au cœur du pays des mirabelles, nous en profitons pour acheter ces fruits délicieux au marché, sous forme de confiture, d’eau-de-vie et de liqueur (particulièrement bonne ajoutée à du vin blanc très sec). Les emplacements dans le port de plaisance de la Société des Régates Messines sont très bien équipés et bien situés pour rejoindre le centre ville.
Après avoir passé d’autres écluses sur la Moselle et traversé de magnifiques paysages forestiers, nous arrivons à Neuves-Maisons où se termine la Moselle en tant que voie navigable pour les gros bateaux. Nous poursuivons sur le canal des Vosges. Avant la première écluse (38,50 m x 5,20 m à partir de maintenant), nous plaçons sur la proue l’altimètre que Monsieur Schönberger nous a confié pour passer sous les ponts bas. Il est réglé sur une hauteur de pont minimale de 3,50 m. Mais attention, les fortes pluies ou les crues peuvent rapidement modifier la hauteur, et soudain il peut manquer 20 cm.
Nous amarrons à Richardménil, une petite commune qui a tout ce qu’il faut au plaisancier : eau, électricité, supermarché, boulangerie, boucherie et plusieurs restaurants. Au dessert, nous prenons du sorbet de mirabelles arrosé d’eau-de-vie à la mirabelle. Un délice.
Le lendemain, nous passons 16 écluses avant d’atteindre la petite ville de Charmes, au cœur d’une magnifique région très boisée. Grâce au menu du restaurant Dancourt, nous vivons un grand moment gastronomique : mousse de truite chaude, cuisse de canard farcie, grand plateau de fromages et délicieux desserts. Si les Français n’arrivent pas toujours à préserver le réseau de canaux, ils savent cuisiner...
Charmes – Strasbourg/Canal de la Marne au Rhin
Plusieurs écluses étant fermées, nous changeons d’itinéraire et retournons d’abord à Richardménil pour rejoindre Toul, et dans le Port de France proche du centre, nous changeons d’équipage : notre fille et notre gendre quittent le bateau après une semaine de temps frais et souvent pluvieux, mais pleine de belles expériences. Nous sommes à présent six sur notre bateau : nous, notre fils, notre belle-fille et nos deux petits-fils âgés de 6 et 3 ans. Le soir, nous transformons le salon en chambre. Le canapé se convertit rapidement en véritable lit 2 personnes.
Nous voilà de retour sur la Moselle. Nous la quittons à Frouard pour rejoindre le canal de la Marne au Rhin. Le port Saint-Georges de Nancy est notre destination. La serviabilité mutuelle est excellente. On vous propose (presque) toujours de l’aide à l’amarrage, par exemple. Nous apprécions beaucoup cette solidarité.
Neuf écluses plus loin, nous nous arrêtons à Einville-au-Jard. En raison des courants souvent désagréables, les écluses sont plus difficiles à passer.
Au bout de 9 km et de deux écluses, notre atteignons un bel emplacement à Parroy avec aire de jeu, très accueillant pour les enfants. Nous préparons le bateau pneumatique pour notre gendre et nos deux petits-fils qui rament avec enthousiasme sur le canal assez large à cet endroit. Nous préparons aussi le barbecue.
Le lendemain matin, nous profitons à Lagarde de la première occasion de faire le plein de carburant. Depuis Schwebsange, nous avons consommé 134 l de gazole, soit 1,8 l par heure. C’est vraiment raisonnable pour notre solide gaillard de 55 chevaux qui tourne avec si peu de bruit dans la cave située sous le salon. À une écluse, un gentil vieux monsieur vend des mirabelles fraîchement cueillies, un régal !
Dans la dernière écluse d’aval en amont à Réchicourt (15,70 m. de haut), c’est la cohue comme toujours. Seuls deux bateaux peuvent vraiment s’attacher. Les deux autres tentent de mouiller au moins une corde. Cette fois, l’éclusier est toutefois clément et fait entrer l’eau lentement. Nous avons connu d’autres éclusiers.
Le soir, nous préparons des grillades au Port de Houillon, au début du canal de la Sarre. Le très sympathique capitaine du port prend aussi les commandes pour les baguettes et croissants du petit-déjeuner. La station de carburant qui figure encore sur les cartes est fermée depuis des années.
Le lendemain, nous traversons d’abord les tunnels de Niderviller (475 m.) et Arzviller (2 306 m.) qui sont à sens unique et fonctionnent avec des feux de signalisation. Il faut être concentré pour toujours rester au milieu. En touchant le bord, on pourrait aussi endommager le toit de notre Linssen.
À peine avons-nous passé le deuxième tunnel que nous approchons du plan incliné d’Arzviller. C’est une attraction touristique. De nombreux spectateurs observent les bateaux entrant dans un ascenseur pour surmonter 44,55 m. en une vingtaine de minutes. Cet ouvrage extraordinaire remplace 17 écluses.
Dans la magnifique vallée de la Zorn, la rivière, le canal, la route et le chemin de fer se serrent étroitement. La forêt nous accompagne jusqu’aux portes de Saverne.
L’emplacement situé en face du château des Rohan offre peu de protection. Nous profitons de la présence de nombreux commerces et admirons les bâtiments historiques avant d’amarrer après 6 autres écluses à proximité de la petite commune de Dettwiller, au bord d’un pré. Le barbecue du soir est encore la meilleure manière, et la plus détendue, de finir la journée avec les petits.
Après 8 écluses parcourues dans la plaine d’Alsace, avec ses nombreux villages aux maisons à colombage et fermes anciennes toutes fleuries, nous atteignons Souffelweyersheim, un joli petit port à proximité de Strasbourg, puis, au bout de trois heures tout juste, le port de plaisance du Bassin de l’Hôpital à Strasbourg. L’accueil sympathique dans ce club privé mérite toujours des louanges. C’est à pied que nous nous rendons à la cathédrale, dans la vieille ville et dans le quartier de la Petite France. Strasbourg vaut toujours le voyage, d’autant que le temps joue cette fois en notre faveur.
Strasbourg – Dannemarie/Canal du Rhône au Rhin (tronçon sud)
Le lendemain, nous mettons le cap sur le canal du Rhône au Rhin/tronçon nord. Jusqu’à Boofzheim, nous suivons ce cours d’eau idyllique. Comme d’habitude, nous nous attardons longuement le soir avec un verre de vin sur le pont arrière. Pour nous, les vacances en bateau, c’est bien cela : être assis là le soir, à la faible lumière de quelques bougies, et observer la nature qui s’endort.
Le lendemain, nous atteignons le Rhin à Rhinau. Au départ, il était prévu de descendre le Rhin, mais comme le canal des Vosges est fermé, nous devons le remonter. Bien que le moteur tourne à haut régime, il est impossible de dépasser les 4 à 6 km/h, même si le Rhin est régulé par des écluses sur ce tronçon. Au bout de 30 km et après deux grandes écluses, nous sommes soulagés de faire escale dans le port de plaisance de Vieux-Brisach. Nous terminons cette longue et fatigante journée de navigation par une brève balade en ville par temps lourd d’avant l’orage et nous félicitons d’avoir trouvé la dernière table de libre à la terrasse ombragée d’une brasserie.
Le lendemain matin, nous avons la possibilité de faire le plein dans la marina située en face, du côté français, avant de poursuivre en amont, c’est-à-dire plus précisément sur le Grand Canal d’Alsace. Nous prenons à tribord et pénétrons dans l’écluse Kembs-Niffer qui permet la liaison avec le canal du Rhône au Rhin/tronçon sud. Tout de suite, nous entrons dans le petit canal de Huningue qui est seulement navigable sur 2 km jusqu’à notre emplacement prévu. Attention : il y a dans le canal un fort courant qui peut s’avérer très gênant pour amarrer. Nous sommes accueillis très agréablement au port de plaisance de Kembs.
La partie du canal du Rhône au Rhin qui a été aménagée pour les gros bateaux et jusqu’à la première écluse, la n°41 (16,5 km), est un peu monotone. Au bout de quatre heures au total, nous atteignons le Vieux Bassin, la marina de Mulhouse. Elle est toujours pleine à craquer, en raison notamment des nombreux bateaux qui restent amarrés sur de longues périodes. En ce début d’après-midi, il est assez tôt pour trouver encore un bel emplacement. Il nous reste donc beaucoup de temps pour explorer cette belle cité. La vieille ville avec son magnifique hôtel de ville du XVIe siècle, l’église Saint-Etienne, les nombreuses maisons à colombage fleuries et les places pittoresques nous plaisent beaucoup.
À partir de l’écluse n°39, il faut s’annoncer la veille pour passer. Un deuxième équipage peu loquace nous accompagne après le déjeuner jusqu’à la marina de Dannemarie, où nous allons faire demi-tour. En cette journée, nous avons réussi à passer 22 écluses et deux pont-levis, mais c’est facile avec les équipages accompagnant qui nous précèdent pour préparer les écluses et les referment ensuite derrière nous.
L’accueil est très sympathique dans la marina relativement grande. La capitaine du port vantée par de nombreux navigateurs est toutefois absente : elle est en vacances en France bien que la marina connaisse une période de grande affluence au mois d’août.
Retour : Dannemarie - Merzig
Le lendemain : à 10h00, l’équipage d’accompagnement nous attend à l’écluse n°17. Cette fois, nous voulons interrompre le trajet jusqu’à Mulhouse, et ce devant l’écluse n°34 à proximité de Zillisheim. Nous amarrons au bord d’un pré, dans un petit coin douillet. La commune y a planté quelques poteaux en bois, cela suffit pour créer un emplacement idyllique. Le soir, c’est à nouveau barbecue. Nous nous attardons longuement sur le pont supérieur et profitons de l’ambiance paisible. La nuit commence à tomber, la lune et les arbres se reflètent dans l’eau. On dirait un tableau romantique de Caspar David Friedrich.
Nous sommes fiers de maîtriser si bien notre bateau alors que nous ne sommes que deux. Le taquet qui se trouve exactement au milieu du bateau nous est très utile puisqu’il permet souvent d’amarrer avec un cordage. C’est qu’il s’agit d’un yacht Linssen : très bien pensé. Mais il y a toujours des améliorations à apporter, p.ex. une échelle latérale pour monter et descendre, comme nous aurions voulu en avoir une dans le pré. Deux marches suffiraient.
Une fois passé Mulhouse, nous nous retrouvons sur le large canal de liaison avec le Rhin. Il y a une forte houle. Un petit bateau devant nous cherche un appontement pour se réfugier. Notre bateau n’a toutefois pas de difficultés. Jusqu’à Kembs, nous nous frayons un passage et sommes heureux d’avoir à nouveau un bel emplacement protégé.
La descente du Rhin est si belle. Nous glissons à faible régime en direction de Vieux-Brisach où nous arrivons dès le début d’après-midi. Nous retrouvons à nouveau un emplacement dans le sympathique club nautique de la ville. Nous partons en balade dans le quartier historique et visitons l’église collégiale. Manifestement, Vieux-Brisach est un point central en Allemagne sur le trajet vers Saint-Jacques de Compostelle car on y voit partout son emblème, la coquille Saint-Jacques.
Nous faisons le plein de carburant pour la dernière fois dans la marina Vogelgruen et pénétrons dans le canal du Rhône au Rhin/tronçon nord à Rhinau. Après 8 heures de navigation, nous trouvons un emplacement dans le port exploité par VNF (Voies Navigables de France). Dans un petit restaurant, nous savourons une grande salade au chèvre et bien sûr encore une tarte flambée.
Le lendemain, nous apprécions particulièrement la traversée de Strasbourg, puis nous retournons sur le canal de la Marne au Rhin. Nous remontons à nouveau le cours d’eau et utilisons les cordages avant et arrière dans les écluses. Même à deux, ces manœuvres ne posent pas non plus de problème. 8 heures après, nous faisons escale à Waltenheim-sur-Zorn. Nous flânons dans un village rural plein de fleurs avec des maisons à colombage bien entretenues et de grandes cours de fermes aux immenses portails.
Pour la baguette du matin, il faut se rendre dans le village voisin, à 3/4 d’heure à pied. Nous avons mal calculé notre route qui avait l’air bien plus courte, mais une voie ferrée nous impose des détours. C’est que la baguette sortie du four est indispensable. Nous naviguons à nouveau à travers la plaine d’Alsace et ses jolis villages. C’est tout simplement beau ! Dès le début d’après-midi, nous atteignons Saverne, où nous faisons escale cette fois.
Le lendemain, nous passons 4 écluses et attendons devant le plan incliné d’Arzviller. L’ascenseur nous conduit jusqu’en-haut et nous traversons les deux tunnels suivants sans aucun problème. Nous avons pris l’habitude nous semble-t-il et nous sommes détendus. Il n’y a plus d’écluse jusqu’au port de Houillon, sur le canal de la Sarre.
Nous poursuivons sur le canal en direction de Mittersheim. L’ancien canal des houillères de la Sarre servait au transport du charbon sarrois vers l’Alsace et le Rhin. En pratique, il n’est plus utilisé par la navigation commerciale. Sur le plan paysager, c’est une expérience à faire. Il y a d’abord les nombreux lacs que l’on voit des deux rives du canal. Puis, belles forêts et prés en alternance, entre villages et étangs. À Mittersheim, la marina a été rénovée et généreusement réaménagée il y a quelques années. Y séjourner est un plaisir et on y trouve toujours un emplacement de libre.
À 9h30, nous avons rendez-vous à l’écluse n°14. Bien que toutes les écluses soient désormais à commande électrique, il y a toujours un éclusier qui vous accompagne à mobylette. Un charmant couple de Merzig passe l’écluse avec nous. Nous sommes vite coordonnés et utilisons les bollards idéals. C’est ensemble que nous arrivons vers 18h00 à Sarreguemines et trouvons un bon emplacement à proximité de la ville au club nautique L’Eau Reine. Sarreguemines est la ville du grès. Si la production de porcelaine y a été abandonnée, on y fabrique encore des dalles et carrelages.
Le lendemain, nous entrons dans la dernière écluse à péniches, Güdingen, où nous rendons notre télécommande. Nous voilà de retour sur la Sarre et en Allemagne. Nous passons Sarrebruck sans s’y arrêter puisqu’il y a des chantiers de construction partout sur les rives. Espérons que les emplacements près du vieux pont subsisteront.
Sur la suite de notre descente, il y a encore trois écluses, la dernière étant celle de Rehlingen que nous abordons toujours avec grande prudence pour y être resté accrochés à deux reprises déjà. Heureusement, nous avons à chaque fois réussi à nous en sortir avec un coup de pied courageux contre le cordage, sans devoir le couper. À 17h00, nous sommes amarrés dans la marina de Merzig et, le soir, au restaurant Zum Skipper, nous trinquons à notre magnifique croisière et à notre retour sain et sauf. De retour à l’appontement, nous croisons les Schönberger affairés à leurs bateaux. Conclusion : nous nous réjouissons déjà de notre prochain voyage avec le « Delfin » !
Parcours navigué :
Sarre – Moselle – canal des Vosges jusqu’à Charmes et retour car barrage – Moselle – canal de la Marne au Rhin – canal du Rhône au Rhin/tronçon nord - Rhin – canal du Rhône au Rhin/tronçon sud – Rhin – canal du Rhône au Rhin/tronçon nord – Canal de la Marne au Rhin – canal de la Sarre – Sarre, 1 005 km, 255 écluses, 2 x 2 tunnels, 2 x plan incliné.
Consommation :
384 l de gazole pour 211 heures de navigation, consommation env. 1,8 l par heure
Durée : 5 semaines